Vous êtes bien traducteur-interprète, non ?

Posted on 17 décembre 201519 janvier 2017Categories Interprétation, TraductionTags , , , ,

[L’article original a été publié en néerlandais le 17 décembre 2015.]

Avec mes articles sur le blog, j’essaie régulièrement d’éclaircir des considérations erronées. C’est notamment le cas aujourd’hui. Et c’est sans faire de salamalecs que j’entre dans le vif du sujet : les traducteurs et les interprètes ne sont pas des dictionnaires ambulants. (Et non, nous ne parlons pas toutes les langues. Et si vous pensez que chaque traducteur ou interprète a l’anglais dans son créneau de langues : la réponse est non.)

Afin de favoriser la lisibilité de cet article, je citerai uniquement les traducteurs, mais mes propos valent aussi bien pour les interprètes.

Les traducteurs vivent souvent les mêmes anecdotes à l’occasion de fêtes de famille ou de soirées de réseautage. Des étrangers rencontrés par hasard commencent par leur demander quel métier ils exercent. Leur réaction : « Oh, vous êtes traducteur-interprète ? Mais quel est votre vrai métier ? » Sur quoi le traducteur explique que traduire est une vraie profession, qui permet en effet de gagner sa vie, et que les traducteurs et les interprètes ne font pas tout à fait le même travail, et qu’il n’est donc pas ‘traducteur-interprète’, mais uniquement traducteur. À peine l’étonnement – et parfois aussi l’incompréhension – est-il dissipé chez votre interlocuteur, qu’il tente de vous retenir : « Savez-vous d’ailleurs ce que signifie ‘ascèle’ en néerlandais ? On m’a posé la question dernièrement à l’occasion d’une partie de scrabble. Eh bien, j’ai d’abord dû chercher avant de connaître le sens du mot en français : sans jambes. Vous savez, ce qu’on appelle vulgairement un cul-de-jatte. Mais alors, comment dit-on cul-de-jatte en néerlandais ? »

Il y a des chances que le traducteur connaisse la réponse, s’il parle le néerlandais et pour peu que le terme existe dans la langue de Vondel. Mais il se peut tout aussi bien qu’il n’en sache rien. Il est possible que le traducteur ait l’air ridicule, mais ne vous fiez pas trop vite à cette impression. Ce traducteur est peut-être excellent dans sa profession ou son domaine. Or, cela n’implique pas qu’il apprenne par cœur les dictionnaires.

Non, d’ailleurs un traducteur ne transpose pas les mots, mais bien les réflexions ou les idées. Un mot ne se trouve jamais seul. Un mot en tant que tel ne dit rien ou si peu. Certains mots ont en outre plusieurs traductions dans d’autres langues. Parfois aussi les traductions sont tellement inattendues, que vous en restez les jambes coupées. Sans doute êtes-vous en train de ricaner, mais c’est la vérité. Daar waar je in Vlaanderen en in Nederland de hond in de pot vindt als het eten op is, ziet je schoonmoeder je ongetwijfeld niet graag in de Arabische wereld. D’accord, il s’agit d’expressions, mais le traducteur, n’applique-t-il pas partout et toujours la même stratégie ? Nous ne transposons pas les mots comme le ferait un dictionnaire de traduction (et comme le font les machines qui prétendent traduire), mais nous essayons de cerner ce qu’un auteur ou un orateur veut vraiment dire, et tentons d’obtenir le même effet dans l’autre langue. Les dictionnaires de traduction sont d’ailleurs l’ennemi numéro un des traducteurs qui ne savent pas comment les utiliser … Traduire ou interpréter littéralement ne se fait qu’à de rares occasions (par exemple dans le cas d’enquêtes policières, quand les suspects utilisent un langage codé). Celui qui reprend les traductions du dictionnaire sans même réfléchir, risque de se retrouver plus d’une fois à côté de la plaque.

En somme, la prochaine fois que vous rencontrez un traducteur ou un interprète, montrez-lui que vous savez qu’un traducteur n’est pas nécessairement un interprète, et inversement, et ne partez pas du principe qu’il a appris par cœur le Petit Robert. Demandez-lui plutôt quels sont les sujets qu’il traite. Il est fort probable que vous trouviez des points communs avec vos champs d’intérêt ou votre profession.

Des spécialisations

Posted on 1 septembre 201516 mars 2018Categories Commercial, TraductionTags , , ,

[Lees hier de oorspronkelijke Nederlandse tekst.]

En juillet, à la demande d’une confrère de Flandre occidentale, nous avons traduit une brochure qui traitait de bijoux. Cette collègue était à la recherche d’un traducteur anglais – néerlandais. Après s’être renseignée et avoir passé quelques coups de fil, elle s’est adressée à nous. Ce travail, Déesse l’a volontiers accepté : les vacances d’été allant généralement de pair avec un planning peu chargé. Aussi tout travail supplémentaire est-il le bienvenu.

Sarah se chargerait de la traduction et moi de la révision. À la relecture du travail effectué, je réalisais une fois de plus que la traduction est une discipline à part. Quand bien même un thème peut paraître extrêmement banal (à peu près tout le monde porte des bijoux !), le texte qui en parle peut quant à lui s’avérer bigrement compliqué à traduire.

Personne n’a toutes les spécialisations

Parfois je reçois des courriels de sollicitation de traducteurs et/ou d’interprètes qui prétendent avoir une dizaine de spécialisations. Il arrive aussi que je reçoive de tels courriels de la part d’escrocs, mais cela, je l’ai déjà raconté dans un autre blog (disponible en néerlandais uniquement). Il va de soi qu’il doit être particulièrement difficile d’être spécialisé dans dix domaines différents, même après trente ans de carrière. Si au cours des années, vous avez eu l’occasion de traduire un texte sur les chariots élévateurs, cela ne fait pas de vous un spécialiste de ce type de machines !

Ce point faible pour de nombreux traducteurs, interprètes et agences de traduction, est précisément le point fort de Déesse : nous connaissons nos limites. Nous savons quelles compétences et spécialisations nous maîtrisons en interne : des textes de marketing concernant la mode, les bijoux et accessoires, des traductions à caractère juridique (destinées à la Belgique), l’interprétation de réunions syndicales. Voilà ce qui fait notre force en interne. Mais pas dans n’importe quelle combinaison de langues, cela va de soi.

À chacun ses thèmes

Pour les thèmes et combinaisons de langues qui n’entrent pas dans nos aptitudes internes, nous faisons appel à des traducteurs et interprètes free-lances qui s’en chargent mieux que nous. Parce que chez Déesse, nous sommes seulement satisfaits si nous délivrons de bons textes, et si notre travail d’interprétation est discret, efficace et pertinent.

Vous le remarquez, vous, en tant que client ? Non. Vous nous contactez, Sarah ou moi ; le reste se déroule en coulisse. Il se peut que nous réalisions le travail nous-mêmes. Il est possible aussi que nous fassions appel à un free-lance pour nous donner un coup de main.
Ce qui nous importe, est :

– que vous puissiez vous adresser à une seule personne (par ailleurs bien sympathique) pour tous vos travaux de traduction et d’interprétation ;

– que cette personne vous apporte ses conseils ;

– que vous puissiez compter sur un service optimal.

Nous sommes tous les jours en contact avec différents free-lances (par exemple par le biais de GentVertaalt, un réseau flamand informel de traducteurs et d’interprètes, dont Sébastien est le cofondateur) qui possèdent différents domaines d’expertise et qui proposent leurs propres combinaisons de langues. Déesse sait parfaitement à qui confier quelle mission ; à la grande satisfaction de nos clients.

Mise à jour :

Entre-temps, avec l’expérience, et plus récemment avec l’arrivée de Marc dans notre équipe, notre champ thématique s’est élargi. Nous ne craignons pas les traductions qui portent sur des sujets tels que le management d’entreprise ou l’automobile.

La localisation : le pire cauchemar de chaque programmeur

Posted on 7 août 201416 mars 2018Categories Blog, TraductionTags , , , ,

[L’article original a été publié en néerlandais le 7 août 2014.]

C’est un secret de Polichinelle que Déesse s’est lancée dans la traduction et le développement de logiciels. En effet, nous développons pour l’instant un logiciel qui permettra aux traducteurs et interprètes de gérer leurs projets et leur administration.  « Nous », c’est à dire ma collaboratrice, un programmeur professionnel et moi-même. À la base, le logiciel est développé en néerlandais, mais entre-temps nous préparons également le code en vue de sa localisation dans différentes autres langues.

La « localisation », ce terme tant détesté. Il n’est pas facile de localiser du logiciel. Chaque langue ne commence pas à gauche pour aller à droite. Certaines langues sont plus concises que d’autres. Surtout quand le code original est écrit pour l’anglais, les boutons et les zones de texte sont souvent trop petits pour le traducteur français. Les programmeurs connaissent beaucoup de langues (PHP, JavaScript, CSS, et cetera), mais pas les mêmes langues que les traducteurs ; de plus, ils ne peuvent pas tout savoir ni tout connaître. D’habitude, ils rafistolent leur code au fur et à mesure que les traducteurs envoient leurs remarques. Un travail de Sisyphe.

Computerphile est un canal YouTube montrant des vidéos  informatiques. Il y a quelques jours, Computerphile a publié une vidéo sur la localisation de logiciels, vue de la perspective d’un programmeur. Une vidéo drôle et instructive à la fois.

Internationalis(z)ing Code – Computerphile

Faut-il redorer le blason des traducteurs et des interprètes ?

Posted on 8 avril 201416 mars 2018Categories Blog, Commercial, Interprétation, TraductionTags , ,

Il y a quelques mois, Tom Van Cleempoel, Mick de Meyer et moi-même, en tant que fondateurs de GentVertaalt, étions réunis chez de Taalsector (vous savez bien, l’organisateur des Language Industry Awards) pour une interview. Un des sujets abordés était l’image du traducteur et de l’interprète lambda. Mandela venait tout juste d’être enterré.  De plus, au journal l’on parlait des tribunaux qui ont parfois recours au public pour l’interprétation. Le traducteur-interprète a une mauvaise image : grand temps donc d’en redorer le blason.

Réputation

Les traducteurs et interprètes n’ont pas toujours bonne réputation. Certains nous considèrent comme un mal nécessaire ou comme dernier recours quand le client n’a plus le temps de traduire soi-même. Certains traducteurs et interprètes sont bien évidemment eux-mêmes responsables de cette situation pénible. Mais bien souvent le client est en tort, car il souhaite tout simplement « une traduction » ou « un interprète » sans trop se soucier des détails. Naturellement, une traduction peut perdre sa pertinence sans contexte, étant donné que chaque traduction est différente. De même, certaines missions d’interprétation tombent à l’eau parce qu’un interprète n’a pas obtenu assez d’informations du client et est donc mal préparé.

Constats

Bien, outre toutes ces situations intolérables sur le marché qui alimentent cette perception négative, nous sommes obligés d’établir un autre constat. Si un traducteur ou un interprète fait bien son travail, il est discret. Lorsque son travail est de qualité douteuse, il se fait remarquer. Si tout va bien, personne ne pense à lui, alors que si les choses tournent mal, on parle de lui dans les médias. Souvenez-vous de la crise en Géorgie d’il y a quelques années. Le président français de l’époque avait négocié un accord entre les parties belligérantes, qui a quasiment capoté par une erreur de traduction. Et en effet, cette nouvelle a fait la une. Mais quand des lois sont adoptées au Parlement parce que les interprètes ont livré un bon travail, seuls les parlementaires ramassent les fleurs et les interprètes ne sont même pas mentionnés. Nous ne devons pas constamment nous trouver sous le feu des projecteurs, mais n’oublions pas que nous avons réellement contribué à l’adoption de cette loi.

Le traducteur en tant que mécanicien ?

Faites la comparaison avec le métier du mécanicien. Le mécanicien résout constamment des cas problématiques et a – bien sûr –  l’impression que sa marque est de qualité lamentable. Il oublie les milliers de voitures qui circulent sans problèmes, car elles ne passent pas par son garage. Les traducteurs et interprètes sont logés à la même enseigne. Chaque fois que l’on parle de nous dans les nouvelles, c’est parce qu’un traducteur ou interprète a causé des problèmes. Comment nous faire confiance quand on est uniquement confronté aux cas problématiques ?

Rien n’est moins vrai

Je traduis et interprète presque quotidiennement sans causer d’incidents. Je facilite des réunions plurilingues grâce auxquelles des personnes qui ne parlent pas la même langue peuvent tout de même signer des accords. Tout peut donc se dérouler sans aucun problème. Il faut tout simplement savoir à qui il faut faire confiance et être certain que le client contribue à de bonnes conditions de travail, par exemple en envoyant assez d’information à l’avance. Nous n’avons pas besoin de grand-chose pour bien faire notre travail. Donnez-nous un coup de pouce ; nous avons tellement à vous offrir.

Le crowdsourcing mènera-t-il à l’extinction du traducteur ?

Posted on 17 janvier 201221 décembre 2016Categories TraductionTags ,

[Lisez l’article original en néerlandais]

Il y a quelques temps, Knack, un magazine de qualité flamand, a publié un article intéressant à propos de toutes sortes de sombres prédictions.  La plus connue est celle des Mayas qui prédisaient la fin du monde pour fin 2012.  Ce n’est pas demain que le ciel nous tombera sur la tête, mais alors que dans le secteur de la traduction presque tout le monde  est convaincu que la traduction automatique ne présente pas une grande menace pour le traducteur humain dans les prochaines années, un nouveau phénomène qui peut s’avérer malicieux fait son apparition. Un phénomène qui fait froid dans le dos, c’est-à-dire le crowdsourcing. Mais qu’est-ce au juste ? Le crowdsourcing vous permet d’engager la crowd, donc la grande masse, pour effectuer votre sourcing, donc tous vos approvisionnements. Le crowdsourcing de traductions implique que vous demandez aux internautes qui utilisent vos applications de traduire et de réviser vos applications et pages web. Adieu monsieur le traducteur isolé qui traduit pour gagner son pain. À présent  un traducteur se cache dans chacun de nous.  À condition que nous soyons assez cool bien sûr, car pour participer au crowdsourcing vous devez pleinement utiliser le web 2.0. Les sites tels que Facebook démontrent que le résultat est là. Alors, ce crowdsourcing : bénédiction ou malédiction ?